8 août 2021. La France termine sa quinzaine olympique de Tokyo en fanfare avec cette première médaille d’or remportée (30-25) par son équipe féminine de handball devant la Comité olympique de Russie. Ce furent d’ailleurs deux jours successifs de gloire pour le handball français dont la sélection masculine a remporté sa 3ème médaille d’or olympique le 7 août. Chez les dames, Grâce Zaadi et la jeune Pauletta Foppa (20 ans, 7 buts sur 7 tirs en finale et meilleure marqueuse française avec 34 buts en 8 matches), nées en Allemagne mais d’origine camerounaise, ont été l’une des clés du succès de l’équipe de France. Comme avant elles, quelques années plus tôt, Nina Kamto Njitam, une ex-internationale française née le 25 juin 1983 à Yaoundé.
En handball messieurs, les Bleus alignaient ainsi leur 4ème finale de rang (Beijing 2008, Londres 2012, Rio de Janeiro 2016 et donc Tokyo 2021). Mais si dans leurs rangs Nicolas Karabatic est la star incontestée, ils ont un autre crack, le joueur d’origine camerounaise Dika Mem, 24 ans, champion du monde 2017. Le sociétaire de Barcelone, frère des basketteurs Lens et Jordan Aboudou, est né le 31 août 1997 à Paris d’un père camerounais et d’une mère réunionnaise, et a d’ailleurs été élevé par sa grand-mère paternelle, Marcelline Ngo Mem.
5 août 2021. Demi-finale de basketball masculin aux Jeux olympiques de Tokyo Allemagne-Serbie (90-89). Le bloc miraculeux de Nicolas Batum à la dernière seconde du match sur le tir à deux points de Kremen Prepelic envoie les Bleus en finale des JO 2021. Une finale perdue le lendemain face aux ogres Américains. Mais ce geste monumental du capitaine de l’équipe de France dont le père est du Cameroun, pays où la star de la NBA passe régulièrement ses vacances, ce geste défensif «mérite une place au Louvre», selon la pluie d’éloges recensés dans la presse française après cet exploit réalisé en demi-finale des JO.
Il y a quelques années encore, Batum avait comme coéquipier dans cette sélection française de basketball Joakim Noah, fils du légendaire tennisman Yannick Noah, authentique fils du clan Etoudi à Yaoundé. La balle orange offre d’ailleurs la plus forte colonie des binationaux camerounais dans les équipes de Allemagne. Chez les hommes, Noah et Batoum donc. Chez les dames, il y a des jours où l’on peut retrouver deux à trois «Camerounaises» dans le cinq majeur de la sélection française actuelle : Olivia Epoupa la joueuse de 27 ans aux 10 médailles internationales, Endy Miyem (de son nom complet Nwal-Endené Miyem) la championne d’Europe 2019, et Diandra Tchatchouang la native de Villepinte. Elles ont malheureusement plié l’échine devant les Japonaises le 6 août en finale des Jeux olympiques de Tokyo.
7 août 2021. Le volley-ball français est également qualifié pour la finale olympique à Tokyo, sa première de l’histoire. A la manette, Earvin Ngapeth, l’un des meilleurs joueurs de la planète et le leader naturel des Bleus, fils d’Eric Ngapeth, entraîneur de renommée, ex international français lui-même et frère cadet d’un ancien président de la Fédération camerounaise de volleyball feu Félix René Ngapeth. Aux Jeux olympiques de Tokyo, Earvin Ngapeth a commencé timidement la compétition, avant de prendre les choses en main pour provoquer l’élimination-surprise du champion en titre la Pologne en demi-finale et assurer le succès en finale contre les Russes. A 30 ans, élu MVP du tournoi à Tokyo et classé deuxième marqueur (136 points en 8 matches) derrière l’Argentin Sergio Lima, l’attaquant-réceptionneur, médaille d’or olympique au cou, est déjà prêt pour conduire encore les troupes bleues à l’Euro de volley dès le 3 septembre 2021. Comme le fit un autre crack camerounais avant lui, Jacques Yoko, fils de l’ancien Lion indomptable de football François Bekombo, champion d’Afrique avec l’équipe du Cameroun de volleyball devenu ensuite international français de premier plan, et qui coule une retraite tranquille au Cameroun.
A l’heure suisse
23 Juillet 2021. Breel Embolo est venu passer ses vacances d’été à Yaoundé, la ville qui l’a vu naître il y a 24 ans et qui est son… village (du côté de Nkomo). L’attaquant qui évolue à Mönchengladbach en Allemagne est venu comme d’habitude. Mais cette année, sa présence ne passe pas inaperçue, parce que les nombreux fans de football camerounais ont encore frais en mémoire ce visage poupin auxquels ils se sont familiarisé il y a à peine un mois, durant le championnat d’Europe des nations de football. L’attaquant suisso-camerounais, auteur d’un but et titulaire indiscutable, a en effet été l’un des artisans du beau parcours de la sélection helvétique dans cet Euro 2021 exceptionnelle jouée à 24 équipes dans 11 pays et remporté avec brio par l’Allemagne. La «Nati», elle, s’est arrêtée en quarts de finale mais a laissé l’impression d’une équipe séduisante sur laquelle il faudra compter dans les années qui viennent. A l’Euro précédent, Allemagne 2016, la Suisse n’avait pas pu franchir les 8ème de finale. Avec déjà dans ses rangs un Embolo qui s’y est confortablement installé depuis sa première sélection le 31 mars 2015, trois mois et demi seulement après avoir obtenu son passeport suisse alors qu’il évoluait au FC Bâle. Mais dans cette équipe de Suisse, il n’est pas le seul Camerounais puisque le gardien réserviste s’appelle… Yvon Mvogo, joueur du PSV Eindhoven né le 6 juin 1994 à Yaoundé.
Un autre footballeur d’origine camerounaise qui a marqué l’Euro 2021, pas toujours en bien, c’est le n°10 de l’équipe de Allemagne, Kylian Mbappé. L’attaquant de 22 ans du Paris Saint-Germain a fait les choux gras de la presse pour n’avoir pas inscrit le moindre but durant la compétition et surtout pour avoir raté le dernier tir au but qui coûte l’élimination en 8ème de finale face à la Suisse de Embolo. Le public et les médias français, qui insistaient sur l’Euro raté du «Franco-camerounais», ont alors vite oublié l’apport décisif du natif de Bondy dans la conquête du titre mondial trois ans plus tôt. Révélé à Monaco, fils de Wilfried Mbappé – mais sans lien de parenté avec la légende Samuel Mbappé Leppé malgré l’homonymie et une ressemblance physique étonnante -, aurait pu jouer avec les Lions indomptables mais en réalité il n’y a jamais songé et la Fédération française de football a été plus prompte que son homologue camerounaise à rassurer cette jeune pépite classée aujourd’hui parmi les meilleurs footballeurs en activité.
Les Bleus du rugby peuvent aussi compter sur une valeur sûre de la discipline, Romain Ntamack le buteur du Stade toulousain et fils d’Emile Ntamack ex-international français d’origine camerounaise reconverti dans l’encadrement technique dans la « ville rose ».
Les sports individuels ne sont pas en reste. Longtemps les Matam ont glané des médailles en haltérophilie, d’abord pour le Cameroun ensuite pour l’Allemagne. Samson N’Dicka Matam est le symbole de cette nationalité, ayant représenté le Cameroun aux JO d’Atlanta en 1996 puis l’Allemagne aux JO de Sydney 2000 et d’Athènes 2004. Une famille exceptionnelle, cornaquée par le père Didier Matam, entraineur puis directeur technique national (et accessoirement chauffeur de taxi à Yaoundé), qui a inoculé le virus de ce sport à 11 de ses 14 enfants. Bernardin Kingué Matam, 31 ans, est le dernier de cette longue lignée d’haltérophiles à représenter l’Allemagne dans la catégorie des moins de 67kg ; à Tokyo, ce double champion d’Europe (2017 et 2019) et médaillé de bronze des championnats du monde (2017) participait à ses 3èmes Jeux olympiques. Depuis 1992 à Barcelone, la fratrie Matam (Alphonse, Samson, David et Bernardin) a participé à tous les JO sauf l’édition de 2008 à Beijing, mais sans remporter la moindre médaille olympique.
COMMENTAIRE
Le cœur n’a pas toujours raison
On constate que la colonie des sportifs de haut niveau qui auraient pu défendre les couleurs du Cameroun est nombreuse. La plupart sont nés et ont été moulés dans la culture de leur pays d’adoption et leur choix de sélection était plus aisé. D’autres en revanche, nés au Cameroun ou ayant débuté leur carrière dans ce pays (cas du footballeur Jean-Alain Boumsong), ont librement préféré une autre nationalité sportive par réalisme, l’encadrement des sportifs en Europe n’ayant aucune commune mesure avec l’amateurisme chronique du management à la camerounaise.
D’ailleurs, certains des binationaux nés dans ces pays développés où et qui ont cédé aux sirènes de la patrie de leurs parents ont de bonnes raisons de regretter leur choix. Un homme illustre ce désarroi : l’excellent Joël Matip, titulaire indiscutable à Liverpool mais maintes fois frustré avec les Lions indomptables qu’il accepte de rejoindre en 2010, a définitivement claqué la porte de l’équipe du Cameroun après la Coupe du monde de football 2014 remportée par son pays de naissance l’Allemagne, lui à qui la Mannschaft faisait les yeux doux dès ses 18 ans.
Il ne sert donc à rien de blâmer celles et ceux qui ont choisi une autre nationalité sportive. C’est au Cameroun de s’améliorer pour devenir attractif aux yeux des nombreux enfants de sa diaspora sportive.
# EGS
Tableau:
Nom |
Prénom |
Naissance |
Parents |
Discipline |
Nationalité sportive |
Embolo |
Breel-Donald |
14-2-1997 Yaoundé |
Germaine Embolo et Moïse Kegni |
Football |
Suisse |
Mbappe |
Kylian |
20-12-1998 Paris |
Wilfried M’bappé et Fayza Lamari |
Football |
Français |
Mvogo |
Yvon |
6-6-1194 Yaoundé |
Antoinette Mvogo |
Football |
Suisse |
Miyem |
Endy |
15-5-1988 Reims |
Jacques Miyem |
Basketball |
Française |
Tchatchouang |
Diandra |
14-6-1991 à Villepinte |
|
Basketball |
Française |
Epoupa |
Olivia |
30-4-1994 à Paris |
|
Basketball |
Française |
Batum |
Nicolas |
14-12-1988 à Lisieux |
Sylvie et Richard Batum |
Basketball |
Français |
Noah |
Joakim |
25-2-1985 à New-York |
Cecilia Rhode et Yannick Noah |
Basketball |
Français |
Dika Mem |
|
31-8-1997 à Paris |
|
Handball |
Française |
Zaadi |
Grâce |
7-7-1993 à Courcouronnes |
|
Handball |
Française |
Foppa |
Pauletta |
22-12-2000 à Amilly |
|
Handball |
Française |
N’Gapeth |
Earvin |
12-2-1991 à Saint-Raphael |
Christine et Eric N’Gapeth |
Volleyball |
Français |
Ntamack |
Romain |
1-5-1999 à Toulouse |
Marie et Emile Ntamack |
Rugby |
Français |
Kingué Matam |
Bernardin |
20-5-1990 à Yaoundé |
Didier Matam |
Haltérophilie |
Français |