Dans une note rendue publique le 27 juillet dernier, le Centre national de développement de l’informatique (CENADI), une institution rattachée au ministère des Finances et qui revendique une place de conseil du gouvernement sur les questions informatiques, a préconisé la constitution d’un portefeuille de cryptoactifs destinés, par exemple, à certaines dépenses de souveraineté.
« Il s’agit, par le biais des transactions au sein de l’écosystème, de comprendre précisément les habitudes de nos populations et celles de la sous-région, et d’être en mesure d’apporter des réformes fiscales, juridiques et réglementaires pertinentes dans l’intérêt supérieur du Cameroun », a déclaré l’institution, saluant l’initiative de la République centrafricaine et dénonçant le retard pris par la Banque centrale, à la traîne au même titre que des pays en conflit. Le décryptage d’Idriss Linge, rédacteur en chef de l’Agence Ecofin sur Kalak FM.
Cette publication du CENADI est complexe à appréhender. L’institution attribue plusieurs fonctionnalités à une cryptomonnaie camerounaise qui serait créée si sa proposition était acceptée. Elle vise à limiter la propagation de « paradis fiscaux d’un genre nouveau aux effets potentiellement dévastateurs » pour l’économie et à renforcer les dépenses de souveraineté. Elle mentionne également une avancée sur une initiative visant à établir des passerelles de paiement entre le e-naira (cryptomonnaie émise par la Banque centrale du Nigeria) et un actif comparable développé par le Cameroun.
« Le CENADI, en collaboration avec IBM, travaille à élaborer le cadre expérimental d’un Hackathon digital qui rassemblera, outre la communauté des développeurs, des experts fiscaux, douaniers, juristes, la Banque centrale et les opérateurs économiques, afin d’évaluer les scénarios de faisabilité pouvant être mis en œuvre à grande échelle pour un paiement transfrontalier e-naira # e-CFAToken », peut-on lire dans la publication.
Cette information marque un tournant, sachant que la République centrafricaine avait été critiquée par les autres pays membres de la CEMAC pour avoir développé des cryptoactifs lui permettant de financer son économie en Bitcoin. Même si le CENADI utilise des termes techniques, sa proposition s’apparente à la création d’une monnaie parallèle au franc CFA.
Il n’est pas précisé que ces évolutions annoncées par l’institution, notamment la mise en place d’un système permettant la création de cryptoactifs conformes aux standards universels, sont soutenues par le ministère camerounais des Finances, organe de tutelle du CENADI et autorité monétaire nationale. L’information demeure également floue quant à la participation active du Nigeria à ce projet de collaboration entre e-naira et eCFAToken.
Le timing de l’initiative camerounaise soulève des questions. Les cryptomonnaies ont récemment perdu en valeur et ont été entachées de scandales impliquant bon nombre de leurs principaux promoteurs. D’une valeur globale de 3 000 milliards $ fin 2021, elles se stabilisent aujourd’hui autour 1200 milliards de $. Enfin, la BEAC, Banque centrale de la CEMAC dont fait partie le Cameroun, avait indiqué avoir ouvert des réflexions sur le sujet, et ses conclusions ne sont pas encore accessibles au public.
Source: www.agenceecofin.com